Mail à … Manuel Valls

Salut Manu,

« Quelle indignité ! » Tu reconnaitras ici la réponse, avec un air outré, de Sarkozy à David Pujadas lors du débat des primaires. Ces dernières années j’ai souvent entendu certains de tes collègues de droite ou de gauche et toi-même dire qu’il fallait avoir ‘un vrai débat de fond’. Et bien c’est fait, vous l’avez atteint le fond. En ce qui te concerne, tu es même au-delà, j’ai l’impression que tu creuses maintenant pour installer une fosse à purin. Prévois large !

Toi aussi tu as un beau costume avec une belle veste qui se retourne facilement. J’imagine que tu sais que cette expression a été inventée à cause d’un autre franco-espagnol, Charles-Emmanuel de Savoie. Il voulait être roi de France ou d’Espagne, alors il avait un manteau réversible aux couleurs de chaque pays. Ce n’est donc pas toi qui a inventé l’opportunisme, ni le ridicule, mais tu viens d’en repousser les limites en politique.

L’opportunisme, chacun comprendra pourquoi. Pour ce qui est du ridicule, Macron t’a à peine remercié du bout des lèvres en insistant sur le fait qu’il était le garant du renouvellement du personnel politique. Une manière de te dire que tu vas…valser !

Avec des soutiens si soudain, in-extrémis et empoisonnés comme celui de Le Drian ou du tien, Macron voit bien le piège qui risque de se refermer sur lui en acceptant les habiles qui quittent le navire présidentiel en espérant choper le prochain yacht à l’embarquement. Rallier un candidat au moment ou il est quasi certain de gagner, ce n’est pas du ralliement, mais de l’opportunisme. Ce n’est pas de la politique, mais de la combine.

Tu t’es déshonoré et ridiculisé par, ce que certains ont qualifié de traitrise hier en t’entendant dire que tu allais voter Macron. Le 15 décembre dernier à l’occasion des primaires de la gauche, tu avais pourtant signé un engagement à soutenir le vainqueur de celles-ci quel qu’il soit, en l’occurrence Hamon. Tu n’es même pas décevant, nous n’en sommes plus là. Pour te punir gentiment, j’aurais envie de te filer une dissertation de philosophie à rédiger. Le sujet serait : La conscience en politique. Tu as toute une vie pour l’écrire.

Pourquoi 40 % des Français ne votent pas et pourquoi bien davantage encore ne croient plus en la politique ? Laurent Joffrin donne une explication dans Libé de ce matin :  « Fillon le père la vertu n’est qu’un Tartuffe (…). Valls se contredit sans ciller. Le Pen poursuit ses diatribes anticorruption alors que son parti est accusé d’utiliser les mêmes expédients suspects que les membres du «système».« 

Il fut un temps où les hommes politiques de premier plan avaient des joutes télévisuelles brillantes. Il y avait du spectacle mais aussi des idées. On se souvient de l’escarmouche de haute volée entre Chirac et Mitterrand. Comparable à Nadal contre Federer en finale de l’Open d’Australie cette année. Il y avait des coups bas, mais à fleurets mouchetés. Il y avait des coups droits, maintenant avec vous les seconds couteaux, il n’y a plus que des revers.

Eric Laforge

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PS : Ces Présidentielles ressemblent à une partie de cartes dans laquelle on aurait enlevé les as, pour ne garder que les valets.